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UN PEU D'HUMANISME DANS UNE CAMPAGNE DE BRUTES
Gènes: les propos de Sarkozy "pas scientifiquement fondés", pour les experts
09 avril 13:18 - PARIS (AFP) - Attribuer aux gènes la responsabilité de la pédophilie et des suicides de jeunes, comme l'a fait récemment Nicolas Sarkozy, est "scientifiquement non fondé" et risque d'ouvrir la voie à une forme d'eugénisme, ont mis en garde ce week-end des spécialistes médicaux.
"C'est une ineptie purement idéologique qui est totalement à côté des acquis actuels de la science et de la génétique en particulier", selon le Pr Bernard Golse, pédopsychiatre à l'hôpital Necker-Enfants malades.
"Entamer une croisade sur l'aspect génétique de la pédophilie est scientifiquement non fondé", ajoute le Pr Golse, interrogé par l'AFP.
Dans un récent entretien avec le philosophe Michel Onfray paru dans Philosophie magazine, M. Sarkozy assurait "incliner (...) à penser qu'on naît pédophile". A propos du suicide des jeunes, il déclarait: "Ce n'est pas parce que leurs parents s'en sont mal occupés! Mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité".
Assurant qu'"il n'y a pas de gène d'un destin malheureux", le généticien Axel Kahn a jugé dimanche "relativement grave" l'existence de "tout un courant qui prétend que les gènes sont tellement déterminants (...) qu'ils sont responsables de certains désordres de la société, et que par conséquent, la contrainte, les difficultés économiques, les malheurs sociaux n'y sont pour rien".
Insistant sur la liberté de l'homme et pointant le risque d'eugénisme, Mgr André Vingt-Trois, archevêque de Paris, avait aussi critiqué samedi l'idée d'une éventuelle prédétermination génétique des pédophiles.
"L'idée d'une pédophilie prédictible et génétique, c'est purement renouer avec le chromosome du crime de Cesare Lambroso", criminologue italien du XIXe siècle, relève le Pr Golse.
Or, défendre l'idée d'un tel type de déterminisme est "extrêmement dangereux", met en garde Christine Bellas-Cabane, présidente du Syndicat national des médecins de la protection maternelle et infantile (SNMPMI), rappelant, elle aussi, les risques de dérives eugénistes.
Elle avait été l'an dernier, ainsi que le Pr Golse, parmi les initiateurs de la pétition "Pas de zéro de conduite pour les enfants de 3 ans" s'opposant au projet, défendu par l'ex-ministre de l'Intérieur, de détection précoce de troubles du comportement pour prévenir la délinquance.
Les récents propos de M. Sarkozy renvoient aussi à une "façon très linéaire, réductrice et faussement prédictible d'utiliser la génétique", note le Pr Golse.
Or, dit-il, compte tenu des acquis de la science, on "n'est plus du tout dans une génétique causale reliant un gène et un effet comportemental", mais dans "une génétique beaucoup plus complexe, une génétique de vulnérabilité".
Avoir des "facteurs de susceptibilité, de prédisposition, cela ne suffit pas pour devenir délinquant ou se suicider, il y a des effets de rencontres avec l'environnement au sens large: relationnel, psychologique, sociologique, politique, culturel", souligne-t-il. Il n'y a, dit-il, "aucune prédiction possible parce que, par définition, les effets de rencontres sont imprévisibles, sinon notre vie serait entièrement écrite à l'avance".
En ce qui concerne la pédophilie, il n'y a "pas la moindre preuve" de gènes de susceptibilité, insiste-t-il.
Une expression comportementale est "souvent reliée à plusieurs types de facteurs qui s'entrecroisent, qui s'articulent", souligne aussi le Pr Gérard Schmidt, président du Collège de pédopsychiatrie.
"La maturation cérébrale continue jusqu'à l'adolescence" en interaction avec les expériences vécues, ajoute-t-il, mettant en garde contre toute prédiction sur la base de comportements précoces ou de caractéristiques purement génétiques.
© 2007 AFP
UN EPIHENOMENE, MAIS CA FAIT REFLECHIR
Ces Français issus de l'immigration tentés par l'extrême droite
09 avril 11:40 - PARIS (AFP) - Le phénomène reste minoritaire mais prend une ampleur inédite: des Français issus de l'immigration, pères de famille ou jeunes de banlieue, se disent prêts à voter à la présidentielle pour Jean-Marie Le Pen, champion de la "préférence nationale".
"Je vais voter pour Le Pen", affirme sans hésiter Mourad Asfour, 25 ans, étudiant en histoire de l'art à Dijon.
Pour lui, le candidat du FN, finaliste inattendu de 2002, crédité cette année de 13% à 16% des intentions de vote, est le seul candidat qui "incarne l'amour de la France".
Arrivé du Maroc à 1 an, ce musulman pratiquant approuve la priorité donnée à la lutte contre l'immigration car "les capacités d'accueil de la France sont saturées". Il estime que M. Le Pen partage avec lui certaines "valeurs morales", comme l'opposition au mariage homosexuel.
Il n'est pas isolé: le Canard enchaîné a fait état d'un sondage réalisé pour le ministère de l'Intérieur, selon lequel 8% des Français originaires du Maghreb seraient prêts à voter Le Pen. Soit plus de 100.000 électeurs potentiels.
Le candidat d'extrême droite a réussi un coup médiatique vendredi, en se rendant sur la dalle d'Argenteuil où l'UMP Nicolas Sarkozy, qui y avait parlé de "racaille", est mis par ses rivaux au défi de revenir.
Il avait déjà surpris en choisissant une jeune fille d'origine nord-africaine pour illustrer une des premières affiches de sa campagne 2007.
"Plutôt de gauche", Habiba Boualem, une juriste de 35 ans, dit que le parti socialiste ne lui "convient plus". Et puisqu'elle ne voit "aucune différence" entre le FN et l'UMP, elle choisit "l'original plutôt que la photocopie" (formule qu'affectionne Le Pen). C'est donc le candidat Front national qui aura son suffrage.
Cette fille d'immigrés algériens, qui vit dans la cité du Mirail à Toulouse, souhaite une "régulation de l'immigration".
"Le pauvre chasse plus pauvre que lui", constate avec amertume Sophia Chikirou, 27 ans, membre des instances dirigeantes du PS et auteur de "Ma France laïque".
Egalement fille d'immigrés algériens, cette militante du XXe arrondissement de Paris a constaté que nombre de commerçants immigrés de son quartier s'étaient engagés pour Le Pen.
Par exemple, propriétaires de petits hôtels réquisitionnés par les services sociaux pour l'hébergement de familles de sans-papiers, ils se retrouvent face à des dégradations. "Ils en veulent aux autorités et disent: +avec le Pen on sera débarrassé des sans-papiers et de la polygamie+".
"Y en a marre de voir des Maliens sans papiers logés dans des hôtels", confirme Farid Smahi, membre du bureau politique du FN, qui se déclare "Français patriote et musulman", et n'hésite pas aller vanter la "préférence nationale" dans des banlieues pauvres où il était autrefois "insulté".
Grâce à son association créée pour aider les enfants irakiens pendant l'embargo international, M. Smahi a réussi à se "faire accepter", puis se "faire entendre". Il assure avoir apporté 3.500 adhésions d'immigrés en moins d'un an au FN.
Perçu d'abord comme un "épiphénomène", le vote FN d'origine immigrée comporte désormais une "part d'adhésion", note le politologue Jean-Yves Camus.
C'est le cas de A.M., avocat algérien de 50 ans reconverti dans le commerce à Paris, père de deux enfants scolarisés dans le privé, qui ne supporte plus de voir ses impôts "distribués à des blacks et des arabes" pour lesquels la France ne serait "qu'une vache à traire".
Il votera donc Le Pen, même s'il estime que "le bâton peut se retourner" un jour contre lui.
© 2007 AFP
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