Article rédigé par Dr Blackjack
Nom : Landstalker, le trésor du roi Nole.
Editeur : Sega, programmé par Climax Entertainment.
Console : Megadrive.
Année : 1992 (Japon), 1993 (USA, Europe).
Nombre de joueurs : 1
Genre : Action-RPG
S'il y avait bien un fait incontestable, c'est que les possesseurs de Megadrive n'ont pas été très gâtés en matière de jeux de rôle (Role Playing Games ou RPG, pour ceux qui ne suivent pas). À part la série des Shining (excellente) et des Phantasy Star (excellente aussi), les segamaniaques pouvaient rester sur leur faim. Mais, en ce qui concerne les Action-RPG (ou A-RPG), la 16 bits de Sega n'avait pas grand chose à envier à ses rivales de l'époques. Avec Light Crusader, Story of Thor, Soleil, WonderBoy 5 et 6, les fans de la 16bits noire en avaient pour leur argent. Mais s'il y a bien un titre qui reste implanté dans les mémoires pour être LE A-RPG le plus culte de cette machine, c'est bien Landstalker. Et il faut bien reconnaître que malgré les années, le hit de Climax n'a pas perdu de sa superbe.
Un héros... charismatique.
Tout d'abord, qu'est ce qui fait que ce jeu, sous ses airs anodins de jeu d'aventure à la Zelda en 3D isométrique (peu commune à l'époque), dans son univers d'heroic fantasy, est devenu une référence en la matière malgré une féroce concurrence?
Sans doute pas son scénario, qui bien qu'offrant quelques rebondissements bien sentis, ne brille pas par son originalité : juste après avoir réussi à dérober une statue dorée dans un temple antique et l'avoir revendue à un marchand, notre héros, Ryle (Nigel en US), jeune elf chasseur de trésor de son état, se fait bousculer par une petite succube du nom de Friday. Cette dernière lui demande de la cacher d'une voleuse humaine, Kayla et de ses 2 acolytes Ink et Wally, car ceux-ci savent qu'elle connaît l'emplacement du trésor du roi Nole. N'écoutant que son courage sa cupidité, Ryle la sauve à condition qu'elle le conduise au plus près du trésor.
Une technique... irréprochable.
Sa réalisation technique alors ? Il est vrai qu'elle était exceptionnelle à sa sortie, mais les graphismes, l'animation et les bruitages ont bien vieilli, et ce, même si le jeu reste très agréable à regarder. La 3D isométrique est détaillée, avec quelques effets sympathiques. Cependant, les ombres ne sont pas représentées. Ce "détail", ainsi que la perspective, entraînent des problèmes de jouabilité sur lesquels je reviendrai. L'animation est fluide, sans réel coup d'éclat, mais sans défaut majeur pour autant. En même temps, le héros et les ennemis n'ont pas beaucoup de postures ou d'actions différentes. Les bruitages sont assez moyens et assez peu variés mais assurent leur rôle et n'empêchent pas de profiter de la musique.
Des musiques... enchanteresses.
Ses musiques ? Elles y sont pour beaucoup. Composées par Motoaki Takenouchi à qui l'on doit déjà les excellentes musiques de Shining Force CD et de Shinig Force II, elles créent une ambiance vraiment unique, parfaitement adaptée aux lieux visités : sombre et oppressante dans les donjons, elle se fait plus enjouée dans les villages, et sait se montrer plus épique lors des combats contre les boss. Il arrive même que certains joueurs se mettent spontanément à fredonner certaines d'entre elles tant leur composition est envoûtante. Personnellement, je m'écoute régulièrement la musique de la carte, qui est aussi celle de l'un des derniers labyrinthes. Bref, du travail d'orfèvre.
Une jouabilité... délicate.
Sa jouabilité? Certainement pas ! Non pas que les commandes répondent mal ou qu'elles soient trop complexes, bien au contraire, les actions étant réduites à leur strict minimum: A ou C pour frapper ou prendre et déposer/lancer un objet et B pour sauter, l'inventaire étant disponible en appuyant sur Start. Et c'est tout. Et puis les commandes répondent au doigt et à l'œil. En fait comme je le disais plus haut, ce qui rend la jouabilité délicate, ce sont plusieurs lacunes. Déjà la perspective choisie : la vue 3D isométrique oblige dans ce jeu à des déplacements uniquement en diagonale, chose qui nécessite un temps d'adaptation, et qui rend certains sauts délicats quand on les associe à des changements de direction. Aussi, cette vue donne des perspectives faussées, certains blocs ne se trouvant ni à la hauteur ni à la distance estimée. Ajoutez à cela l'absence d'ombre pour les sprites et vous comprendrez que les séquences de plate-forme pure sont aussi hasardeuses qu'horripilantes.
À noter que le jeu se voulait plus accessible que la concurrence de l'époque pour une raison simple : il fut intégralement traduit en français, chose assez rare pour être signalée. Et malgré quelques fautes d'orthographe, cette traduction est de qualité.
Un humour... ravageur.
Mais alors, qu'est ce qui fait de ce jeu le chef-d'œuvre dont tant de joueurs parlent ? Eh bien, en plus de ses musiques exquises, le jeu possède une ambiance vraiment unique. Beaucoup plus mûre qu'il n'y paraît de prime abord, elle contribue à une philosophie en décalage avec les jeux aux scénarii bon enfant de l'époque: notre héros ne se bat pas pour sauver le monde ou libérer une princesse (même s'il le fait et pas exprès, dixit Friday), mais pour s'enrichir ! S'il sauve des gens, c'est parce que Friday l'y contraint un peu, et celle-ci lui fait presque office de conscience.
Alors, bien sûr, on retrouve les poncifs du genre: la princesse, le dragon, la déesse, le traître... Mais la princesse est une gourde, le traître succombe de mort violente... Et je ne vous parle pas de certaines attitudes carrément douteuses ! Un exemple? Au moment d'entrer à Mercator pour la première fois, un choix vous est proposé et les puristes verront de quoi je parle ! Il faut avouer que cet aspect n'est pas trop flagrant, peut-être aussi parce que le titre a subi une petite censure en occident, on est encore loin de Conker's Bad Fur Day, mais pour l'époque, le jeu en a surpris plus d'un.
Aussi, le jeu est saupoudré d'un humour très présent, les personnages secondaires étant là pour le rappeler : Kayla et ses acolytes se mettent dans des situations impossibles, Pocket le voleur revient toujours bredouille de ses chasses au trésors... Et puis il y a notre tandem central : Ryle, l'aventurier peu loquace et Friday la chipie qui devrait tourner sa langue 7 fois dans sa bouche avant de l'ouvrir.
Une originalité... à toute épreuve.
Le jeu propose quelques originalités dans la gestions des achats, des sauvegardes ou même des séjours chez l'aubergiste : dans le lieu adéquat, on s'empare de l'article ou du livret qui nous convient et on le dépose sur le comptoir. Pour les soins, en cas d'évanouissement, ils sont prodigués par Friday automatiquement tant qu'il reste des Eke-eke dans l'inventaire. Les pièces d'équipement (qui arrivent assez tard dans le jeu) et les réverves de vie (à noter que plus on en possède, plus les coups de Ryle sont puissants), sont à dénicher dans des coffres, parsemés ça et là dans les méandres du jeu. Tous les trouver constitue un vrai défi en soi, les quêtes annexes étant pourvoyeuses de bonus intéressants.
Une difficulté... déroutante.
Ajoutons à cela un challenge carrément corsé, avec des énigmes bien tordues, des phases de plate-forme quasiment à l'aveugle et des labyrinthes tentaculaires et vous comprendrez que ce jeu n'est pas fait pour les petites natures. Et c'est aussi une des raisons qui font que ce jeu est une référence : on a maudit un nombre incalculable de fois les programmeurs pour cette plateforme mal placée, pour ce labyrinthe vert interminable, pour cet indice qui ne veut rien dire... mais on se dit que ce n'est pas impossible et la satisfaction d'avoir réussi n'en est que plus grande. Et finalement, quand on y repense, on se dit que le jeu était une épreuve d'une grande difficulté mais pas insurmontable et on se le rappelle des années plus tard, le soir entre vieux amis aguerris, autour d'une bonne bière, au coin du feu, en déclarant fièrement: "moi aussi j'y étais, et j'ai réussi."
Le jeu parfait n'existe pas... mais son test... peut-être.
C'est aussi ça la marque des grands jeux: ils laissent, malgré leurs défauts, des souvenirs émus impérissables.
Alors, Landstalker, jeu culte ? Assurément!
Graphismes: 16/20
Animation: 14/20
Musique/Son: 18/20
Jouabilité: 13/20
Intérêt/Durée de vie: 19/20
Note Globale: 19/20
Il est important de noter que le jeu a failli connaître les honneurs d'un remake sur PSP, avec décors en vrai 3D, mais le projet a avorté en 2006. De plus, cette merveille n'a pas vraiment eu de suite officielle, à part peut-être le désastreux LadyStalker, véritable honte pour la Super Famicom. Il y a bien Dark Savior sur Saturn, mais s'il reprend le même principe, il n'est pas une suite pour autant. Certains disent que le jeu Alundra sur PSX pourrait satisfaire les fans, le chara designer (Yoshitaka Tamaki) étant celui de Landstalker. Même si le succès de cette perle resta sans lendemain, il faut reconnaître qu'il marqua définitivement l'histoire de Climax : Friday est la mascotte de Climax Entertainment et Ryle fait une apparition surprise dans le moyen Climax Landers (Timestalker) sur Dreamcast.
P.S.: Si je n'ai que 2 conseils à donner, et pour ne pas gâcher le plaisir de la découverte, n'hésitez pas à parler à tout le monde, et même plusieurs fois de suite. Ça peut débloquer pas mal de situations, et donner des indices très précieux. Et soyez un minimum logiques, toutes les énigmes trouvent leur solution dans leur environnement proche. À bon entendeur.
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